Ce soir, je n’ai pas envie de me prendre la tête.
J’ai envie de m’évader loin avec un bouquin. Tu as ça, toi ?
– Je te laisse regarder. Je bats les Blancs avec le fouet.
– Tu… quoi ?
– Fais pas cette tête-là ! Je cuisine.
– Ah oui ! Où avais-je la tête ? J’ai tellement envie de hurler à mes collègues que je suis éreintée de leurs cascades d’emmerdes, que je prends tout au premier degré.
Je caresse les tranches des livres, la tête inclinée sur la droite. Je me penche, je m’accroupis. Kant, Goethe, Sartre tout en haut ; Camus, Proust, Balzac et Stendhal en dessous. Rayon suivant, des récits de Paul-Emile Victor et Alexandra David-Neel. Près du sol, le journal de Mickey, Astérix et Obélix, Tintin, Lucky Luke.
Je suis empêtrée dans mon ambivalence. Relire les classiques ou s’abaisser pour feuilleter les aventures de Pluto.
Je tourne le dos à la cuisine ; il ne voit pas mes mains s’abandonner à la découverte d’un album de Lucky Luke. Est-ce bien raisonnable ?
C’est étonnant toutes les idées qui peuvent nous passer par la tête. Parce que là, maintenant, j’ai une envie folle de m’asseoir dans l’herbe mouillée, la tête plongée dans un récit.
Par temps de pluie, les romans à l’eau de rose sont parfaits. Comme leur nom l’indique, ils coulent tout seuls. J’ai arrêté, je suis trop émotive ces temps-ci. SI j’en lis, je vais être triste. Savoir que le docteur Williams ne peut pas épouser l’infirmière Shirley parce que sa femme a un cancer, et qu’il passera pour un salaud dans tout l’hôpital s’il la quitte en pleine agonie… ça me colle un de ces bourdons !