Le tintement de la clochette n’ameute personne. Les yeux plissés, je tente de distinguer forme humaine dans le fatras de la mercerie. Je me revois enfant, à froncer les sourcils sur mon livre 3D pour trouver le motif caché.
– Y a quelqu’un ?
Il fait si sombre là-dedans, j’essaye de me diriger à l’échos, comme les poissons avec leur sonar. Il avait fallu qu’elle me file la seule référence de bouton introuvable sur Internet. Alors que les sites pullulent et que le monde entier va pêcher dans le fleuve Amazon. Moi je me tapais l’étang marécageux et l’odeur de vase.
Le toussotement imperceptible suspend mon pas. Posture de flamand rose et oreille à l’affût, je tente d’identifier la source de la respiration.
– Vous cherchez ?
Mon cœur a failli lâcher. Elle est apparue à côté de moi, du haut de son mètre 52.
– Vous étiez cachée sous le meuble?
Elle me regarde sans changer d’expression. Rien ne bouge derrière ses lunettes rondes.
– Vous cherchez ? Persévère-t-elle.
Timidement, je lui tends le papier avec la référence du bouton. Ses mains n’ont pas vu de lait d’ânesse depuis longtemps. Aspect parchemin, elles pourraient certainement raconter l’histoire de l’Egypte ancienne à elles seules. A la lecture du papier, elle se renfrogne.
– Vous m’obligez à la déranger, me dit-elle.
– Qui donc ?
– La patronne. Marguerite.
Sur ces paroles, elle sort une corne de brume et y souffle son poids en volume d’air. Je me bouche les oreilles tandis que ce que je prenais pour un amas de rideaux et de coussins pousse un grognement endormi.
– Vous êtes sûre ? C’est juste un bouton, pas besoin de déranger tout le monde.
– Trop tard, Marguerite est réveillée, me répond la montagne de tissus d’une voix gutturale.
merci pour ce texte très drôle suggestif !
l’évocation du bouton me rappelle une charmante historiette pour enfant écrite par Arnold Lobel dans la collection des Ranelot et Buffolet qui s’appelle Le bouton perdu
Merci Aliette ! Je vais aller consulter cette référence !
Je suis sous le charme ! Les images sont très pertinentes : le fleuve Amazon, la montagne faite femme… C’est un conte, qui donne envie de connaître la suite.
Merci beaucoup Emmanuelle 🙂