La mer

Dans le ciel gris, le cri des goélands. Sur la plage, personne. Elle est seule face à la mer affolée et sauvage. A l’abri d’un rocher, elle reprend son souffle. Elle ne sait plus depuis combien de temps elle marche. Elle est partie alors qu’il faisait encore nuit.

Elle avait besoin de libérer son esprit après une longue journée de train qui lui avait fait traverser le pays. Les paysages ternes d’un hiver pluvieux n’avaient pas réussi à l’extraire de sa morosité. Elle savait que seule la mer, même grise et agitée, lui redonnerait la gaieté qu’elle avait perdu ses derniers temps.

Elle n’aime pas le mois de novembre, les jours qui raccourcissent, les feuilles qui perdent leurs couleurs fauves et tombent pour se transformer en un tapis boueux et froid, les épaisseurs qu’il faut enfiler pour se protéger du froid. Tout ce cortège de servitudes qui déboulent après l’été lui pèsent. Mais là, face aux vagues, le visage fouetté par le vent qui dépose sur ses joues des traces de sel porté par les embruns, elle sent une sensation de plaisir remonter du fond d’elle-même. Les yeux fermés, elle écoute l’eau claquer sur les rochers, les oiseaux crier au large. Les nuages défilent inlassablement jusqu’à ce qu’un rayon de soleil réussisse à s’immiscer entre eux et à l’envelopper d’une chaleur timide.

Elle ouvre les yeux, la mer s’est rapprochée. Combien de temps-est-elle reste immobile. Elle ne le sait pas mais quelques silhouettes emmitouflées l’ont rejointe sur la plage. Un chien qui court après les vagues, un enfant qui tient la main de son père, elle a toujours aimé l’atmosphère de ces grandes plages normandes. Dans son dos, les cabines bleues et blanches délaissées à la fin de l’été ont résisté à l’assaut des premières tempêtes. Pleine d’énergie retrouvée, elle reprend sa marche légère et heureuse.

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