Retour de fête

Dans la nuit, le parquet sous les pieds de Caroline. Ses talons-aiguilles à la main, en équilibre instable sur des jambes témoins dune soirée arrosée, elle tente de se faire discrète. Maurice le poisson rouge ne dit rien. Ouf ! se dit-elle, j’ai passé le salon sans encombre.

Il lui reste un étage à monter, le couloir à traverser, devant la chambre des parents passer et enfin sous la couette glisser.

Le parquet continue de grincer, et la nuit rend ce vacarme assourdissant. Caroline imagine son père tenant la carabine destinée à farcir de plomb les fesses d’éventuels cambrioleurs. La jeune fille tend l’oreille. L’horloge se met à sonner et Caroline sursaute. Un seul gong. Il est une heure du matin, or la fêtarde avait promis de rentrer à minuit. Quelle sera la punition, si elle ses parents la surprennent en flagrant délit de retard ? Caroline tend l’oreille. Des craquements viennent de la cuisine, puis une langue qui lape de l’eau. C’est Pimpon le chat qui a mangé des croquettes. Caroline commence à monter l’escalier. S’ils me punissent, je me sauve vers le lac bleu !

Elle ne sait pas où c’est ; elle a lu ça dans un bouquin ? C’était l’histoire d’une héroïne pourchassée par des monstres sanguinaires et qui s’enfuyait vers un lac où régnait paix et sécurité.

Caroline grimpe une à une les marches grinçantes de l’escalier. Elle s’arrête sur la pointe d’un pied, et tend l’oreille à nouveau. Papa ronfle et maman siffle. C’est bon, ils dorment. Caroline relâche un instant sa concentration. Mais c’est sans compter sur le chien Picpus qui l’attend, la queue frétillante, sur la couette. Le berger des Pyrénées est titillé par l’idée de lui faire sa fête. Voilà le grand jour, ou plutôt le grand soir, pour lui dire combien il l’aime, combien il a envie de caresses. A langue râpeuse la démaquille en deux coups : il la bouscule, lui tourne autour, sans aboyer heureusement. Caroline lance des « Chuuuut » dans la nuit noire, mais on n’entend qu’elle. Dans la chambre à côté, papa ne ronfle plus, maman ne siffle plus… Caroline enfonce sa tête dans ses épaules, courbe l’échine, ferme les yeux, se bouche les oreilles, et… rien.

Picpus remonte sur le lit, fait trois tours sur lui-même dans un sens, puis trois tours dans l’autre sens. Caroline essaie de le repousser un peu. En vain. Elle se tasse conter la bête poilue, et se couche toute habillée.

Un craquement se fait entendre. « Tu ne t’en sortiras pas comme ça », prononce une voix familière.

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