Laisser le vent emporter tout

Il pleut sur New-York. Chaque fois que j’y vais, il pleut sur la grosse pomme. L’eau ruisselle sur ma pomme aussi.

Je voulais envoyer une lettre à Max, mais personne n’avait signalé sa disparition. De Max, pas de ma lettre. Quoique, une lettre sans enveloppe, c’est une feuille volante qui décolle chaque fois que j’ouvre la fenêtre. Va savoir où je l’ai mise… Ah, ça y est, elle était dans mon sac, avec un post-it : « Acheter des enveloppes ».

Je pourrais lui envoyer un mail, à Max, cela m’éviterait le risque de perdre une feuille qui s’envole parce qu’elle n’a pas d’enveloppe où se cacher. Ce serait une bonne idée si je n’avais pas noté l’adresse mail de Max sur une feuille d’éphéméride que j’avais amoureusement arrachée de son socle. Et puis, j’avais ouvert la fenêtre. Félix, mon chat, voulait sortir. Je l’emmène avec moi quand je pars à New-York. Il ouvre grand ses yeux, repère d’en haut des proies inaccessibles. Il se rêve dans Central Park, patiemment tapi dans l’ombre de son ombre, à guetter l’oiseau ou le mulot à m’offrir.

Félix, il s’en fout des feuilles volantes, il suppose que j’ai un téléphone comme tout le monde pour appeler mon amoureux. Mais deux loubards l’ont trouvé à leur goût. L’iPhone, pas moi, hein. J’ai essayé de les courser, leur ai hurlé toutes les insultes apprises dans les films; Mais mon américain à la sauce marseillaise ne les a pas ébranlés le moins du monde. Ils m’ont répondu que je pouvais me faire voir. Si, si, j’ai bien compris.

Je suis allée voir la police, j’ai demandé un traducteur. Trop banal, on m’a dit. Un vol de téléphone, c’est peanuts. J’aurais été témoin d’une chute à vélo dans l’Hudson, ou j’aurais identifié une bagnole au fond du réservoir de Central Park, ça les aurait intéressés. Ils auraient fait des photos pour le bureau.

Ils m’ont souhaité de passer un bon séjour dans la ville. Pour finir, ils ont demandé si j’avais quelque chose à ajouter. « Oui, avez-vous une enveloppe pour me dépanner ? »

Ils se sont dits que les Françaises étaient vraiment bizarres.

L’ambassade n’a pas été plus réconfortante. Ils ont pris ma plainte, promettant de me prévenir si on retrouvait mon iPhone. Et puis ils m’ont fait répété 2 fois mon nom. Il y a eu un silence.

– Vous connaissez Max Dupuis ?

– Oui, c’est mon ami.

– Vous l’avez vu quand la dernière fois ?

– Avant d’atterrir à New-York. Mais je l’ai appelé depuis.

– Et vous lui avez parlé ?

– Attendez… je suis tombée sur son répondeur.

– Mademoiselle, vous ne quittez pas la ville. Max Dupuis a disparu. Vous être notre principal témoin.

 

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