Agnès a un point au cœur. Sa respiration est difficile. Ça lui fait comme un coup de poing dans les côtes, comme un coup de poignard dans les poumons. Elle devrait faire du sport pendant que le soleil est là et qu’elle est encore jeune. Elle ne devrait pas avoir de soucis cardiaques. Il n’y a pas d’antécédents dans sa famille. Agnès le sait au fond d’elle. Ce n’est pas le sport qui va l’aider à soigner son cœur brisé mais elle se dit qu’au moins ça lui changera les idées.
Un train passe. Le sol tremble. Les murs aussi. Agnès reste immobile. Elle a encore raté le coche. C’était peut-être celui qu’elle devait prendre pour avancer au moins d’un petit pas vers l’avant, un petit pas vers la guérison, un petit point de suture pour que ça saigne moins.
La pluie s’invite, d’abord fine presque imperceptible mais elle mouille quand même. Agnès n’a pas pris son parapluie, elle avait parié sur une belle journée d’automne. Elle est sûre et certaine que la pluie fine se dissipera vite, très vite, beaucoup plus vite que la peine qui lui déchire le cœur.
Elle se tient droite, le menton relevé, le regard plongé loin dans l’horizon. Elle redresse ses épaules, elle a les jambes bien ancrées au sol et elle laisse la pluie la chatouiller.
Pour ne pas sombrer, elle avait tenté plusieurs activités et n’en avait retenu que quelques bribes. Se tenir droite, ancrée au sol, le haut de la tête tiré vers le ciel comme si un fil invisible la faisait grandir. Elle garde cette posture en mémoire et se rappelle de s’y appliquer. Ça lui permet de ne montrer à personne qu’elle est démolie au plus profond de ses entrailles.
Son rêve d’enfant ne se réalisera pas. Elle ne peut pas, elle ne peut plus. Son corps ne lui permet pas de faire grandir un autre être en elle. Agnès avait pourtant essayé avec son compagnon du moment ou avec un amant d’un soir. L’important était d’assouvir son désir d’enfant.
Le couperet était tombé. Vous n’aurez jamais d’enfant, lui avait annoncé sans aucune émotion son médecin traitant. Il lui avait tendu une ordonnance avec une foultitude d’antidépresseurs. Agnès l’avait toisé. Tenez, avait-il à nouveau tenté, le regard froid sans compassion. Agnès s’était levée, elle avait froissé le papier en une boule compact qu’elle lui avait jetée à la figure. Qu’est-ce qu’il en savait si elle pouvait ou non avoir un enfant. Il ne savait rien de sa vie passée, rien de ses chagrins, rien du nombre de fois où elle s’était relevée alors qu’il semblait ne plus y avoir aucun espoir.
Agnès était sortie plus déterminée que jamais.
Les jours, les semaines sont passés. Agnès continue à croire en son destin, en une fin heureuse. Elle a laissé son passé ultra-violent derrière elle. Elle ne retombera pas dans le panneau. Elle ne veut plus que de la douceur, de la tendresse, de l’amour inconditionnel, de l’amour éternel, de l’amour inestimable. Elle sait que c’est un rêve inatteignable, qu’il n’y a que les petits enfants qui rêvent comme elle rêve aujourd’hui.
Agnès a compris. L’enfant lui viendra. Avant elle doit s’occuper d’aller bien, d’aller mieux. Elle ne pourra pas accueillir un enfant si elle ne peut plus aimer. Soigner son cœur écrasé, soigner son cœur meurtri, c’est la première chose qu’elle se décide à faire.
La pluie tombe depuis ce matin. Elle rentre finalement chez elle. Le soleil tentera une échappée plus tard dans la journée, elle en reste convaincue.
Agnès se demande comment soigner son cœur. Elle ferme les yeux, met sa main sur sa poitrine. Elle capte difficilement ses battements. Elle respire lentement, profondément. Elle voudrait l’entendre vraiment. Elle voudrait qu’il lui insuffle la vie jusqu’au bout des doigts, jusqu’au bout des orteils.
Après quelques minutes, elle l’entend mieux. Cet exercice est aussi une bribe de ses nombreux cours de méditation. Elle sait comment se focaliser sur sa respiration. Elle est fière de son nouveau rythme cardiaque. Agnès voudrait accélérer la cadence, lui dire qu’il peut se lancer mais elle a encore peur. Elle s’accroche à une autre bribe pendant quelques heures. Elle s’installe à son bureau, trouve un stylo et une feuille de papier. Elle voyage par l’écriture.
Elle n’écrit pas très bien, ses mots ne veulent rien dire. Elle les juxtapose les uns après les autres. Elle aimerait raconter des histoires, de belles histoires mais pour le moment, ses voyages par l’écriture ne partent pas loin, ne la dépaysent pas. Elle fait des bonds miniatures.
Elle avait commencé en faisant des lignes et des lignes de lettres. La calligraphie avait été son premier voyage. Elle avait investi dans une plume et de l’encre de Chine. Agnès faisait très attention à ne pas tacher son papier granuleux. Elle avait rempli des pages et des pages de A, des A majuscules, des A minuscules, des A en cursive, des A avec des boucles en plus. Des A comme Agnès. Des A pour se retrouver elle-même. Des A pour s’émerveiller. Des A pour crier sa peur. Des A pour exprimer ses soupirs, ceux d’exaspération mais aussi ceux de ses plaisirs les plus exaltants. Tous ses A n’étaient pas écrits de la même manière selon leur signification profonde.
Agnès s’était reconnectée à elle-même en remplissant des pages et des pages de A. C’était un petit pas, ça ne correspondait à rien, aucune histoire, mais pour Agnès c’était comme braver des dangers, aussi minuscules soient-ils et s’en sortir, grandie, affirmée, solide pour pouvoir voyager encore plus loin, pour pouvoir écrire des A comme amour, amour de soi, amour de l’autre, amour toujours.
Agnès a la foi, elle ne l’a jamais perdue pourtant elle aurait pu de nombreuses fois baisser les bras. Mais comme les feuilles d’automne récalcitrantes, elle s’accroche aux branches. Elle ne peut pas tomber. Le A se tient toujours debout avec ses deux pieds ancrés et sa tête tirée vers le ciel.
La pluie s’est arrêtée. Agnès continue son voyage à l’extérieur. Elle a besoin d’air, elle a besoin de s’enivrer des parfums d’automne. Ça sent encore la pluie, le béton mouillé, la terre mouillée. Les feuilles collent sur le bitume. Elles s’accrochent toujours quelque part, aux branches, au sol. Même dans leur chute, elles font vite, très vite, pour se rattraper quelque part, ne pas se laisser emporter par le vent ou le souffleur du jardinier municipal. Comment ces feuilles si légères, si dociles deviennent-elles aussi coriaces quand vient l’automne ? Elles ne veulent pas mourir c’est certain même si c’est sûr un jour ça viendra.
Agnès s’installe à la terrasse d’un café, elle garde son manteau, son foulard. Le serveur lui propose l’intérieur. Elle décline poliment. Elle veut admirer le spectacle des feuilles d’automne, leurs couleurs incandescentes. Elle commande un chocolat chaud avec un bâton de cannelle. Le lait est bien mousseux. Elle trempe ses lèvres et s’amuse à lécher sa lèvre supérieure sur laquelle se dessine un sourire blanc neigeux.
Le soleil rougit, le soleil salue et promet de revenir le lendemain. Agnès passe devant le fleuriste place des armes. Elle ne sait pas si elle veut des fleurs roses, blanches, jaunes. Elle en voudrait de toutes les couleurs.
Agnès veut se réconcilier avec les fleurs. Elle a une relation compliquée aux fleurs. Elles avaient un peu tendance à apparaître très peu de temps après une ou deux taches violettes. Agnès le sait bien que les fleurs n’y sont pour rien, que les coups, les poings venaient avant. Alors si elle prend les devants, qu’elle prend les fleurs avant, les coups et les poings ne seront plus dans le même espace-temps, ils auront disparu à tout jamais et, surtout, ne reviendront plus jamais.
Place des armes, il y a ce joli fleuriste qui a dû faire beaucoup de bénéfices à une certaine époque de sa vie. S’en doutait-il qu’il était quasi-complice ?
Agnès respire un bon coup, soupire tout ce qu’elle peut. De jolies fleurs pour égayer son salon, de jolies fleurs, juste de jolies fleurs, mais de quelles couleurs ? Le fleuriste s’approche et lui annonce « On a une promo sur les tulipes, la botte de dix à 2,99 ». Agnès a bien vu mais elle ne sait pas quelle couleur choisir. Elle jette un regard désespéré au fleuriste. Habitué à la question depuis le début de la promotion, il lui propose « Vous pouvez aussi choisir une tulipe de chaque couleur et prendre une botte de dix couleurs. » Le visage d’Agnès s’illumine. Elle part avec son bouquet, décide de suivre un temps les nuages.
Elle se promène avec son bouquet à la main, souriante, vivante. C’est la première fois que son bouquet est synonyme de joie, de gaîté, de légèreté. Après deux, trois tours de pâtés de maison, elle s’inquiète de l’eau qui pourrait leur manquer. Elle veut rentrer vite mais se rend compte qu’elle n’a plus de vase. Le dernier s’est fracassé sur sa tête.
Agnès pense au fleuriste, à toutes les fleurs, toutes les plantes qu’elle y a vues. C’est curieux se dit-elle, il ne vend pas un seul vase. Elle s’arrête à la droguerie, le vendeur lui montre du doigt le rayon des vases. Il a compris sans qu’elle demande. Agnès choisit un vase léger, d’une transparence un peu floue. Elle paye et, cette fois, retourne chez elle pour abreuver les fleurs assoiffées.
Elle pose le bouquet au milieu de la table, bien en vue. Elle s’assoit sur le canapé et reste les yeux figés sur son bouquet, son beau bouquet aux dix couleurs flamboyantes.
Elle a le cœur gros. Des larmes lui montent à la gorge. Son cœur serait-il en train de guérir lentement ? Une seule larme coule, lourde, chaude. Elle emporte du khôl sur son passage. Les verrous n’ont pas encore complètement sauté. Elle a encore beaucoup d’obstacles à franchir, elle le sait mais elle n’a plus peur.
Elle s’endort dans le canapé. Elle espère un sommeil réparateur. Mais l’odeur des fleurs la plonge ailleurs, dans son monde d’avant, dans un monde où on a explosé son cœur. Elle crie dans la nuit. Elle est en sueur. Elle met les bras devant son visage, elle pare, elle baisse les yeux. Il se retourne et la regarde. Il envoie son pied dans son ventre, sur son dos, sur ses cuisses, il frappe sans vraiment viser comme s’il shootait dans un sac de pommes de terre.
Agnès ressent tout les yeux fermés. Sa respiration est saccadée, elle a un point au cœur. Elle a l’impression que son cœur s’arrête, définitivement. Elle est prostrée, elle ne bouge plus, elle fait la morte pour que ça s’arrête.
Un nouveau jour se lève, Agnès ouvre enfin les yeux. Elle est terrifiée. Elle regarde ses bras nus, pas de traces de coups. Elle a pourtant mal partout. Les fleurs sur la table ont fané. Agnès n’est pas encore prête à faire la paix avec les fleurs. Elle veut faire la paix avec elle-même.
A contrecœur, elle jette les tulipes multicolores qui l’ont ramenée trop loin dans la douleur.
Elle prend un café avec une tartine au beurre. Ça ne passe pas, elle vomit tout ce qu’elle a sur le cœur. Agnès ne le sait pas encore mais elle aura une belle surprise pour Noël et cette fois l’enfant s’agrippera et naîtra un beau jour d’été sans nuage.
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PUBLICATIONS DES PARTICIPANTS
J’ai fréquenté durant plusieurs années les ateliers d’écriture Sous les Toits de Cécile et Philippe, que je viens de retrouver en novembre avec Les Petits Papiers. Depuis la pandémie, je me suis lancée un peu plus « sérieusement » dans l’écriture et mené certains projets à bien. Après « le Fils de l’autre », que j’ai déjà présenté sur ce blog, « Avenue du Père-Lachaise » est mon deuxième roman. Il est né de ce qui devait, au départ, être un recueil de nouvelles. Celles-ci étaient souvent liées les unes aux autres en une sorte de « suite », je les ai remaniées pour en faire cet OLNI (objet littéraire non identifié), qui a trouvé son éditrice, les Editions Marie Romaine, https://www.editionsmarieromaine.fr/. Ce roman choral est sorti en janvier 2024. En voici le pitchDeux femmes, trois hommes, un lieu : le cimetière du Père-Lachaise, à Paris. Au fil de ce roman, des vies se télescopent, des destins se lient, des êtres se trouvent ou se séparent. Les personnages rebondissent d’un chapitre à l’autre, tous réunis dans cette mystérieuse nécropole par l’absence, le manque, le deuil, l’espoir d’une renaissance. Si la mort a un jour croisé leur chemin et redessiné leur parcours, sa présence n’arrive jamais à obscurcir cette valse mi-joyeuse, mi-tragique, au terme de laquelle l’un d’eux va disparaître.Et le lien pour découvrir le livre : https://www.editionsmarieromaine.fr/product-page/avenue-du-p%C3%A8re-lachaise-monique-blond Merci pour votre lecture !
La danse du papillon provient d’un texte court produit pendant un atelier d’écriture que j’avais suivi il y a une trentaine d’années. Par la suite, j’ai repris cet écrit à plusieurs reprises, tout en rédigeant d’autres textes sans rapport avec cette ébauche. C’est plus tard que, disposant de temps et de disponibilité d’esprit, j’ai ressorti de mon ordinateur les brouillons successifs du petit texte initial pour travailler encore et encore une histoire dont je ne savais pas très bien où elle allait. Et petit à petit, quelque chose a commencé à prendre forme, qui s’était éloigné du tout premier texte d’atelier, qui puisait aussi dans d’autres textes moins anciens et se nourrissait de fragments nouveaux, parmi lesquels des ébauches écrites pendant des séances de l’Atelier sous les toits. Le soir, des personnages s’invitaient dans mes rêveries, rechignant parfois contre ce que je venais de leur faire faire ou contre le prénom que je leur avais donné, formant petit à petit l’histoire à ma place. Je griffonnais quelques notes et le lendemain, j’essayais de traduire ces notes en écriture… essais parfois fructueux, pas toujours ! Parvenir à la forme aboutie de La danse du papillon m’a pris plus de six ans. Si je reviens sur ce travail d’écriture, je peux distinguer plusieurs aspects. D’abord, le travail de la phrase : portée à écrire de longues phrases pleines de digressions et d’incises dans tous les sens, j’ai dû énormément les retravailler. Pendant plusieurs années, j’écrivais chaque jour un ou deux paragraphes, ou seulement deux ou trois lignes, et je les raturais et les réécrivais indéfiniment les jours suivants en me disant que c’était nul, et moi avec. L’écriture de La danse du papillon m’a servi d’exercice d’écriture mais aussi, en étant aussi quotidiennement présente, m’a coupée d’autres formes, comme par exemple la forme poétique dont je me suis éloignée à regret. Ensuite le travail de la structure : comment organiser l’histoire, présenter les évènements, ménager un certain suspens. Longtemps, le récit n’avait aucune structure, probablement aussi parce que les grandes lignes de l’histoire n’étaient pas encore clairement définies. Puis, quelque chose a « pris » et la structure est apparue. Evidemment, je n’avais pas fait de frise chronologique et mes personnages apparaissaient n’importe quand, à rebrousse-temps : pourquoi pas, en théorie, un récit temporellement déstructuré, mais cela ne se prêtait pas à l’histoire que je voulais raconter. Je me suis donc emmêlé les pinceaux jusqu’à ce que ça tienne à peu près et que je déclare la structure achevée. Désireuse d’en finir, je n’ai pas écouté la petite voix intérieure qui tentait de me dire qu’en fait la structure était bancale. Cécile, à qui j’ai confié la relecture de la première version de ce récit dans le cadre de l’Atelier Face à Face, m’en a aussitôt fait la remarque. Il a fallu me remettre à la tâche, couper, tailler et retailler et m’apercevoir qu’avec la nouvelle combinaison, ça ne collait plus, des évènements se produisent dans le mauvais sens, des gens mouraient avant d’être nés etc…. Finalement, ça c’est fait, en quelques mois. La manuscrit terminé, j’en ai éprouvé à la fois de la joie et de la légèreté. Je n’avais pas l’idée que cet écrit puisse être publié. Je l’ai offert à mes proches en format A4 et c’est de mon entourage qu’est venu l’encouragement à chercher un éditeur… J’ai mis du temps à faire la démarche, je ne me sentais pas légitime et je me demandais ce qu’un bouquin de plus viendrait ajouter à des masses et des masses de livres publiés chaque semaine…. Nombreux ont été les refus implicites (pas de réponse sous 4 mois signifie un refus) et les refus par courrier, certains assortis de commentaires encourageants, jusqu’à ce que les éditions de l’Harmattan acceptent de le publier. Je continue à me demander si publier est une fin en soi : ce qui a compté le plus, c’est d’avoir écrit. Mais maintenant, je ne peux plus faire abstraction du fait que ce livre est publié et c’est vrai que savoir son texte lu par d’autres yeux, d’autres oreilles, par des âmes éloignées que l’on ne connaît pas, et parfois en recevoir un témoignage, c’est tellement fort ! D’une certaine façon, on en fait l’expérience à une autre échelle en atelier d’écriture ou dans le blog de l’Atelier : le partage de ce que l’on a écrit, le retour des lecteurs ou des auditeurs (selon la forme de l’atelier) est une expérience du risque, de la remise en question mais aussi du partage et de la joie. La danse du papillon se commande dans toutes les librairies, sur les sites de vente en ligne et sur le site des éditions de l’Harmattan : https://www.editions-harmattan.fr/livre-la_danse_du_papillon_aliette_zumthor_sallee-9782140294846-74491.html
Tout est parti d’un courrier de lecteur, découvert en septembre 2019 : un professeur de physique-chimie reconnaît, dans sa classe, le fils de son ancien harceleur, qui ressemble trait pour trait à son père. Il s’inquiète auprès de la psychologue de sa réaction possible envers cet élève : ne sera-t-il pas tenté de lui faire payer les persécutions du père, même inconsciemment ? La thérapeute lui répond, entre autres choses, qu’il y a là matière à écrire un roman ! Le samedi, à l’atelier Petits Papiers, chez Cécile et Philippe, je choisis d’écrire un texte inspiré de cette histoire, au gré des fameux « petits papiers ». Les retours plutôt positifs m’encouragent à peaufiner à la maison ma nouvelle Le Portrait de son père, que j’envoie à trois ou quatre revues. L’envie d’aller plus loin ne me quitte pas et je m’inscris à un atelier Premier Roman (en formation pro), pour transformer la nouvelle en roman. En avril 2020, la revue Brèves m’appelle pour m’informer qu’elle souhaite publier Le Portrait de son père dans son numéro 116 (collectif « Jeunesse »). Cela renforce encore ma motivation pour le roman, dont j’achève le premier jet en juin. Je poursuis la réécriture les mois suivants. En plus des retours obtenus en atelier, je fais « diagnostiquer » mon texte en janvier 2021 par un site professionnel, puis, après l’avoir remanié, je commence à envoyer mon manuscrit à des éditeurs en septembre 2021, assorti d’une lettre de présentation longuement travaillée, d’un synopsis, etc. Je continue mes envois jusqu’en mars 2022. Sur la quarantaine d’éditeurs contactés, j’obtiendrai six réponses, toutes négatives, mais parfois encourageantes (quand même !). Enfin, en avril 2022, un éditeur (IGB) me téléphone : il a aimé mon roman, mais attend d’avoir l’avis de son comité de lecture et de son associée pour me donner un accord définitif. La même semaine (!), les Editions Il est Midi me contactent à leur tour pour me proposer directement un contrat. C’est avec eux que je signe, en juin 2022. Mon roman, le Fils de l’autre, sort le 10 octobre. L’expérience a été intéressante, même si le livre n’est vendu que sur commande (en librairie, à la Fnac, chez Amazon et sur tous les sites marchands), donc peu visible. Par ailleurs, Il est Midi n’organise pas de dédicaces et ne participe pas à des salons. Enfin, je n’ai jamais rencontré mes éditeurs, nous n’avons échangé que par mail et au téléphone. J’ai donc réalisé moi-même mon dossier de presse et obtenu deux chroniques (sur Femina.fr et Télé-7-Jours) et deux interviews. Un club de lecture, à Pierrefonds, m’a également invitée à une journée de présentation, et je me suis inscrite à deux salons en 2023 (réponse en attente). L’aventure continue, sans bruit, mais c’est formateur… Encore merci à Cécile et Philippe, dont l’atelier Petits Papiers m’a permis de poser les jalons de mon projet. Je leur ai même volé une très jolie phrase, tirée au hasard des « petits papiers » et que j’ai gardée dans le roman, bien évidemment ! Monique Coant-Blond Pour en savoir plus sur le livre, n’hésitez pas à aller sur mes pages Facebook https://www.facebook.com/profile.php?id=100082078084319 et Instagram https://www.instagram.com/emsie_blond/?hl=fr ou, pourquoi pas, sur le site de l’éditeur https://editions-il-est-midi.eproshopping.fr/1740324-LE-FILS-DE-L-AUTRE-Monique-Coant-Blond
LIVRES AIMÉS
J’ai aimé l’atmosphère; j’ai souri ; j’ai admiré le style; j’ai râlé de frustration lorsque je découvrais les personnages petit à petit et non bien campés en début de livre ; j’ai frémi devant le suspens de l’histoire et des personnages; je me suis laissée bercer par l’ambivalence constante entre rêve et réalité; j’ai été touchée quand j’ai enfin compris les visites d’amitié et de souvenirs de ce groupe hétéroclite et j’ai même versé une larme en refermant le livre.
En passant dans le rayons BD (au RDC, pour les grands, pas au 3e chez les enfants) d’une médiathèque, je me suis arrêtée sur Profession du père, de Sébastien Gnaedig. C’est une adaptation du roman de Sorj Chalandon. Je vous le dis tout de suite : je n’ai pas lu la version sans images. Mais la version adaptée a renforcé l’envie de la découvrir, même si je peux m’attendre à une violence accrue. En noir et blanc, en quelques dessins, l’intensité est présente. La dérive d’une homme dans une période sombre de l’histoire de France. « Les événements » dans nos livres d’histoire, pour ne pas dire « la guerre » d’Algérie. Je ne sais pas ce qu’en pensent celles et ceux qui ont lu S. Chalandon. Cette adaptation est une introduction, une ouverture. Profession du père est publié aux éditions Futuropolis en 2018.
Le point de départ de l’auteure est que nous avons été, ou serons, toutes et tous un jour confrontés à la mort de notre mère. La narratrice, journaliste célibataire de 31 ans, décrit ce qui l’oppose à sa sœur, mariée, 2 enfants. Leur mère meurt brutalement. Assassinée. Le lecteur suit avec la narratrice l’enquête, les arrangements pour vider la maison, ce que deviennent les relations familiales et sociales lorsque l’on perd sa mère aussi dramatiquement. Des secrets vont au fil des pages transformer des vérités jusqu’ici bien établies. Il y a beaucoup d’humour dans ces pages. Et des rebondissements. Le récit m’a parlé, souvent. Mère disparue est paru en 2007, édité par les éditions Philippe Rey.
Trois livres en forme de trilogie de Deborah Levy, auteure sud-africaine vivant en Grande-Bretagne : Le goût de la vie, Ce que je ne veux pas savoir et Etat des lieux. Les ouvrages sont traduits par Céline Leroy. Une écriture très ancrée dans la vie, mais en même temps très subtile, où l’auteure à la fois s’interroge sur la présence du passé dans le présent, et très souvent décale notre regard sur des évènements très simples et quotidiens pour en dégager un aspect neuf. Elle y excelle lorsqu’elle questionne, sans verser dans la démonstration, les rapports de genre, son travail d’écrivaine, ses rêves non réalisés. Elle est souvent drôle, légère et toujours intéressante. Merci à la traduction excellente.
Le cercle des menteurs ou Contes Philosophiques du monde entier rapportés par Jean-Claude Carrière. Habituellement, le terme de « contes philosophiques » me donne envie de rebrousser chemin car c’est un genre dont le ton appuyé, l’intention de donner des leçons produit souvent des textes ennuyeux et « voulus » (ce n’est que mon avis !). Ici, c’est tout le contraire : histoires courtes, du conte à la blague, racontées avec le brio qu’a Jean-Claude Carrière pour s’exprimer. Si l’on connait sa voix, on a l’impression en lisant qu’il est présent et qu’il conte à haute voix. Le premier comme le deuxième tome sont des régals. (en photo le deuxième tome)
Un texte très court (78 pages) sur la maladie contractée à son travail par le père du narrateur. Ce que j’ai aimé dans cette écriture, c’est que sous l’apparente pauvreté émotionnelle du texte, l’auteur, en nous livrant la stricte description des faits et gestes des protagonistes, sans à aucun moment ne juger quiconque, nous laisse toute la place pour mobiliser notre propre émotion et penser par nous-mêmes.
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Epoustouflant portrait d’une femme meurtrie en quête de résilience. Les méandres du chemin vers soi, du fil de soi (ou fil de soie qui suspend la tête dans la posture méditative) sont remarquablement dépeints. Cela donne au texte une densité qui ne faiblit pas. Ceux ou celles qui cherchent à garder la tête hors de l’eau peuvent se reconnaître dans ce récit. Merci Marija.
Merci Emmanuelle pour ton retour sur ce texte que j’aurais voulu plus gai et positif.
Agnès essaie encore et encore pour ne jamais sombrer. C’est peut-être sa lueur d’espoir de ne jamais rien lâcher.