C’est du sabotage. Du sabordage. Un coup de mandale. Un coup de sandale. Les suffixes en –age nous mettent en nage. Les suffixes en –ale se font la malle. Et les préfixes, nous aident-ils à fixer quelque chose ? Dans un pré, à l’herbe rase à perte d’horizon, est-il possible de se sentir juste sur le bord ? Un préfixe pour prendre de l’élan, pour se précipiter, un fixe pour poser le supplémentaire, un suffixe pour signifier que ça suffit. A-t-on besoin d’une fixette pour s’accomplir ? A quoi ça sert d’attendre pour avoir des réponses à des questions qu’on ne devrait même plus se poser ? A quoi ça sert d’attendre pour comprendre ? A quoi ça sert d’attendre que la personne assise face à soi se transforme en prince charmant ?
Depuis quelques temps, pour sortir de son appartement qu’elle trouve parfois petit, mais aussi pour bien séparer sa vie professionnelle et sa vie personnelle, Isabelle s’isole pour travailler. Elle vient dans ce café à 9h32 du lundi au vendredi, elle commande chaque matin une boisson différente pour goûter. Elle n’a pas encore décidé quelle était sa préférée. Dans ce café qui fait l’angle, elle ouvre son ordinateur portable, pose son téléphone juste à côté et enfonce ses écouteurs dans les oreilles. Elle espère ne pas recevoir d’appels pour ne pas déranger.
Elle tape vite sur son clavier, elle répond à des mails, vite, très vite, de manière concise et sans ambiguïté pour que personne ne l’appelle pour lui poser des questions auxquelles elle aurait envie de répondre : t’as lu mon mail ? J’ai tout expliqué de A à Z. Mais non, Isabelle n’ose pas, quand son téléphone vibre, elle sort sur le trottoir pour répondre, de manière pro.
Isabelle chuchote dans son micro, elle croise les doigts pour que la circulation soit inexistante pendant ces appels. Son cœur s’arrête lorsqu’elle aperçoit au loin un camion de pompiers, une ambulance ou une voiture de police. Elle ment lorsque les sirènes hurlent : J’ai la fenêtre ouverte, j’espère que tu n’entends pas trop la circulation. A l’autre bout du fil, la personne ment aussi : non, non, t’inquiète, je t’entends bien.
Isabelle retourne sur sa banquette, elle a choisi sa place préférée à défaut de sa boisson. Elle boit une gorgée et relance la gymnastique de ses doigts sur le clavier. Ils sont une dizaine tous les jours à faire comme elle dans ce café. Tous ont pris leur quartier, repéré la prise pour recharger ordinateur ou téléphone à la bonne distance de leur place. Le matin, ils se saluent d’un bref coup d’œil sans un mot et presque sans sourire. Ils restent tous concentrés sur leur écran, les demandes qui tombent, les réponses à rendre. Certains se lèvent à heure fixe pour aller vapoter ou fumer une cigarette en cachette. Isabelle a remarqué les habitudes de chacun. Elle se demande s’ils ont remarqué les siennes, même si, au fond d’elle, elle pense ne pas en avoir vraiment.
Elle a renversé un peu de son café au lait d’amande avec un soupçon de cardamone. Elle cherche un mouchoir. Elle essaie de faire le moins de bruit possible, un peu comme au cinéma quand elle se surprend à pleurer pour un film qui était censé être une comédie. Isabelle est plutôt prévoyante. Quand elle sait que le film risque de la faire pleurer, elle sort ses mouchoirs dès les bandes-annonces. Comme ça, elle est parée et elle aura le temps d’essuyer ses larmes avant que les lumières se rallument.
Isabelle essuie l’auréole caramel laissée sous sa tasse. Elle regarde par la baie vitrée. Ses yeux se perdent. Elle est là sans être là. Elle est ici comme ailleurs. Machinalement, elle prend sa tasse dans ses mains mais ne la porte pas à sa bouche.
Son ordinateur lui signale la réception d’un nouveau message. Isabelle poste sa tasse sans avoir bu, elle ouvre le message, encore une demande à la con pense-t-elle. Et encore une demande TTU, très très urgente, comme d’habitude.
Isabelle fait des recherches, dans ses dossiers, dans ses archives, elle est sûre d’avoir déjà répondu à une demande de ce type. Elle vérifie les sites officiels au cas où il y aurait eu une légère modification de la réglementation. Isabelle va vite, elle a tous les éléments et répond. On va peut-être la laisser tranquille quelques minutes.
Elle reprend sa tasse, son ventre gargouille. Cette fois-ci, elle boit son café jusqu’à la dernière goutte, sans se laisser distraire par ses mails ni son téléphone. Il était bon ce café au lait d’amande avec un soupçon de cardamone pense Isabelle, mais elle n’en fait pas non plus son préféré.
Isabelle se lance dans une commande de fond, une commande que personne ne lui a faite mais qui, selon elle et son expérience, risque de sortir du chapeau dans pas longtemps. Et pour pouvoir y répondre vite et bien, elle s’y prépare en amont.
De temps en temps, Isabelle lève la tête pour réfléchir à sa formulation, à comment être la plus complète possible. Dans ces courts instants, elle fixe l’horloge au-dessus du bar qui n’est pas à l’heure. Elle n’a jamais été à l’heure se dit Isabelle, elle est calée sur 12h05 comme ça on ne sait pas si c’est midi ou minuit, si c’est la veille ou le jour suivant. Et puis, ça fait comme si on avait toujours cinq minutes de retard tout en étant à l’heure. 12h05, c’est au milieu de tout, au milieu de la journée, au milieu de la nuit.
Isabelle reprend le fil de son argumentaire, de ses recherches. Son ventre gargouille de nouveau, elle boit un peu d’eau. Elle entend du bruit en cuisine, ça grésille, ça rissole, ça ventile, en silence. A côté d’elle, certains commencent à mettre leur ordinateur de côté pour faire de la place. Toujours les mêmes. Ils déplient une serviette en papier pour en faire une nappe. D’autres restent rivés sur leur écran et leur clavier, ils mangeront tout en continuant à travailler sans vraiment voir ce qu’il y a dans leur assiette.
Isabelle passe sa commande, un plat du jour, comme tous les jours, pour ne pas céder à une habitude de prendre toujours la même chose. Dans ce café, elle apprécie la créativité et l’innovation du cuisinier. Elle soupçonne que ce ne soit jamais la même personne aux fourneaux et cette idée lui plaît bien.
La serveuse apporte les plats au fur et à mesure. Elle a très vite identifié ceux qui mangent tôt, ceux qui mangent à la fin du service. Elle circule entre les tables avec une dextérité que lui envie Isabelle. C’est comme si elle glissait, volait et dansait à la fois avec une légèreté qui transparaît sur son visage paisible.
La serveuse pose l’assiette devant Isabelle. Elle sourit face à son expression interloquée. Elle murmure : les petits pois sont rouges. Goûtez, vous m’en direz des nouvelles. Isabelle hésite, elle regarde autour d’elle si un client a aussi pris le plat du jour et s’il se régale. A droite, un habitué de l’entrecôte frites, à gauche, la végétarienne qui ne mange que de la salade verte. En face, un nouveau qu’elle n’a pas vu entrer tout aussi circonspect devant son assiette.
Isabelle plante sa fourchette dans les petits pois rouges, en même temps que le nouveau. Ils atteignent leur bouche respective en même temps. Une grimace se forme sur son visage puis se relâche. Ça la fait sourire, elle en a même oublié le goût des petits pois rouges. Elle mange de gaieté de cœur et le spectacle en face d’elle la ravit. Quelle joie cette pause déjeuner. Ils finissent leur assiette en même temps. A-t-il remarqué qu’ils mangeaient à l’unisson ?
Elle ne le lâche pas du regard. Il paraît avoir un regard triste, c’est dommage. Elle ne sait pas si ce sont les petits pois rouges qui ont eu cet effet mais, d’un coup, d’un seul, elle ose l’impossible : elle se lève et s’installe à sa table. Il est trop tard pour faire demi-tour, il est trop tard pour trouver une excuse bidon. Alors, au lieu de lui demander son avis sur les petits pois rouges pour amorcer la conversation, elle lui demande de but en blanc : comment tu t’appelles ?
Il déglutit. Il ne sait pas s’il doit sourire et elle se demande s’il ne la prend pas pour une folle.
– Alex, Alexandre, enfin Alex, c’est plus court. Et toi ?
Ses réflexes de survie de drague lourde refont surface :
– Coralie, Sylvie, Sinta, Jocelyne
– Hein ? l’interrompt-il. Tout ça ? C’est ton état civil ?
Elle a encore menti. Elle a un prénom pour chaque situation pour se dépatouiller et échapper à des moments qu’elle pense être désagréables.
– Alex, euh non, non, c’est pas mon état civil. Ça te dérange si on prend le dessert ensemble?
– Ben, euh, je sais pas, on se connaît pas.
– Ce serait l’occasion, le taquine-t-elle.
– Ben, si tu veux, Coralie, Sylvie, Sinta, Jocelyne, lui répond-il un peu sur la réserve.
– Isabelle, enfin Isa c’est plus court.
C’est la première fois qu’elle dévoile son vrai prénom à un inconnu. Mais normalement les étoiles sont alignés ou alors il y avait un truc dans les petits pois rouges, c’est sûr et certain.
– Alors, on prend quoi ?
Pas le temps de décider, la serveuse leur apporte un baba au rhum à partager. C’est le dernier, précise-t-elle. Isabelle sourit et laisse Alex commencer. Elle n’aime pas l’alcool et là, le baba a l’air d’être extrêmement imbibé.
Alex plisse son nez. C’est bon mais c’est fort. C’est surprenant. En plus, pour vous dire la vérité, je n’aime pas l’alcool mais la serveuse aurait été déçue si on ne lui prenait pas son dernier baba, non ?
Isabelle plante sa cuillère dans le baba, les yeux plongés dans ceux d’Alex. Elle plisse les yeux et pince les lèvres. Ça brûle dans sa bouche, dans sa gorge. Ils rient tous les deux et reprennent une bouchée en même temps. Autour d’eux, ça pianote sur les claviers de plus belle. Personne ne parle. Tout le monde a pris son repas, connecté ou déconnecté, et a repris le chemin du travail en restant assis à la même place.
Isabelle n’entend pas les signaux sonores de son ordinateur ni les vibrations de son téléphone resté branché à sa place. Alex n’a pas ressorti son ordinateur qu’il avait soigneusement rangé dans son sac. Son téléphone est en mode avion, il préfère. Ça lui donne l’illusion qu’il voyage quelque part tout en restant là.
L’heure tourne mais pas sur l’horloge au-dessus du bar. Isabelle et Alex se parlent tout bas, parfois ils se fixent dans les yeux et laissent leurs âmes communiquer. Ça bouge un peu autour d’eux, des pauses cigarette, des pauses pipi.
Isabelle se lève, lui prend la main. Elle dit : Viens on prend notre après-midi. Elle envoie un mail rapide, enfin elle enregistre un message automatique « Absente cet après-midi » sans aucune autre explication.
Alex et Isabelle sortent sur le trottoir au soleil, ils courent, ils sautillent. Ils ne se posent pas de question. Quelle est la conclusion ? Personne n’en parle, personne ne révèle le secret. Sous leurs chaussures, il n’y a pas de chewing-gum tenace mais des nuages moelleux et roses.
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PUBLICATIONS DES PARTICIPANTS
J’ai fréquenté durant plusieurs années les ateliers d’écriture Sous les Toits de Cécile et Philippe, que je viens de retrouver en novembre avec Les Petits Papiers. Depuis la pandémie, je me suis lancée un peu plus « sérieusement » dans l’écriture et mené certains projets à bien. Après « le Fils de l’autre », que j’ai déjà présenté sur ce blog, « Avenue du Père-Lachaise » est mon deuxième roman. Il est né de ce qui devait, au départ, être un recueil de nouvelles. Celles-ci étaient souvent liées les unes aux autres en une sorte de « suite », je les ai remaniées pour en faire cet OLNI (objet littéraire non identifié), qui a trouvé son éditrice, les Editions Marie Romaine, https://www.editionsmarieromaine.fr/. Ce roman choral est sorti en janvier 2024. En voici le pitchDeux femmes, trois hommes, un lieu : le cimetière du Père-Lachaise, à Paris. Au fil de ce roman, des vies se télescopent, des destins se lient, des êtres se trouvent ou se séparent. Les personnages rebondissent d’un chapitre à l’autre, tous réunis dans cette mystérieuse nécropole par l’absence, le manque, le deuil, l’espoir d’une renaissance. Si la mort a un jour croisé leur chemin et redessiné leur parcours, sa présence n’arrive jamais à obscurcir cette valse mi-joyeuse, mi-tragique, au terme de laquelle l’un d’eux va disparaître.Et le lien pour découvrir le livre : https://www.editionsmarieromaine.fr/product-page/avenue-du-p%C3%A8re-lachaise-monique-blond Merci pour votre lecture !
La danse du papillon provient d’un texte court produit pendant un atelier d’écriture que j’avais suivi il y a une trentaine d’années. Par la suite, j’ai repris cet écrit à plusieurs reprises, tout en rédigeant d’autres textes sans rapport avec cette ébauche. C’est plus tard que, disposant de temps et de disponibilité d’esprit, j’ai ressorti de mon ordinateur les brouillons successifs du petit texte initial pour travailler encore et encore une histoire dont je ne savais pas très bien où elle allait. Et petit à petit, quelque chose a commencé à prendre forme, qui s’était éloigné du tout premier texte d’atelier, qui puisait aussi dans d’autres textes moins anciens et se nourrissait de fragments nouveaux, parmi lesquels des ébauches écrites pendant des séances de l’Atelier sous les toits. Le soir, des personnages s’invitaient dans mes rêveries, rechignant parfois contre ce que je venais de leur faire faire ou contre le prénom que je leur avais donné, formant petit à petit l’histoire à ma place. Je griffonnais quelques notes et le lendemain, j’essayais de traduire ces notes en écriture… essais parfois fructueux, pas toujours ! Parvenir à la forme aboutie de La danse du papillon m’a pris plus de six ans. Si je reviens sur ce travail d’écriture, je peux distinguer plusieurs aspects. D’abord, le travail de la phrase : portée à écrire de longues phrases pleines de digressions et d’incises dans tous les sens, j’ai dû énormément les retravailler. Pendant plusieurs années, j’écrivais chaque jour un ou deux paragraphes, ou seulement deux ou trois lignes, et je les raturais et les réécrivais indéfiniment les jours suivants en me disant que c’était nul, et moi avec. L’écriture de La danse du papillon m’a servi d’exercice d’écriture mais aussi, en étant aussi quotidiennement présente, m’a coupée d’autres formes, comme par exemple la forme poétique dont je me suis éloignée à regret. Ensuite le travail de la structure : comment organiser l’histoire, présenter les évènements, ménager un certain suspens. Longtemps, le récit n’avait aucune structure, probablement aussi parce que les grandes lignes de l’histoire n’étaient pas encore clairement définies. Puis, quelque chose a « pris » et la structure est apparue. Evidemment, je n’avais pas fait de frise chronologique et mes personnages apparaissaient n’importe quand, à rebrousse-temps : pourquoi pas, en théorie, un récit temporellement déstructuré, mais cela ne se prêtait pas à l’histoire que je voulais raconter. Je me suis donc emmêlé les pinceaux jusqu’à ce que ça tienne à peu près et que je déclare la structure achevée. Désireuse d’en finir, je n’ai pas écouté la petite voix intérieure qui tentait de me dire qu’en fait la structure était bancale. Cécile, à qui j’ai confié la relecture de la première version de ce récit dans le cadre de l’Atelier Face à Face, m’en a aussitôt fait la remarque. Il a fallu me remettre à la tâche, couper, tailler et retailler et m’apercevoir qu’avec la nouvelle combinaison, ça ne collait plus, des évènements se produisent dans le mauvais sens, des gens mouraient avant d’être nés etc…. Finalement, ça c’est fait, en quelques mois. La manuscrit terminé, j’en ai éprouvé à la fois de la joie et de la légèreté. Je n’avais pas l’idée que cet écrit puisse être publié. Je l’ai offert à mes proches en format A4 et c’est de mon entourage qu’est venu l’encouragement à chercher un éditeur… J’ai mis du temps à faire la démarche, je ne me sentais pas légitime et je me demandais ce qu’un bouquin de plus viendrait ajouter à des masses et des masses de livres publiés chaque semaine…. Nombreux ont été les refus implicites (pas de réponse sous 4 mois signifie un refus) et les refus par courrier, certains assortis de commentaires encourageants, jusqu’à ce que les éditions de l’Harmattan acceptent de le publier. Je continue à me demander si publier est une fin en soi : ce qui a compté le plus, c’est d’avoir écrit. Mais maintenant, je ne peux plus faire abstraction du fait que ce livre est publié et c’est vrai que savoir son texte lu par d’autres yeux, d’autres oreilles, par des âmes éloignées que l’on ne connaît pas, et parfois en recevoir un témoignage, c’est tellement fort ! D’une certaine façon, on en fait l’expérience à une autre échelle en atelier d’écriture ou dans le blog de l’Atelier : le partage de ce que l’on a écrit, le retour des lecteurs ou des auditeurs (selon la forme de l’atelier) est une expérience du risque, de la remise en question mais aussi du partage et de la joie. La danse du papillon se commande dans toutes les librairies, sur les sites de vente en ligne et sur le site des éditions de l’Harmattan : https://www.editions-harmattan.fr/livre-la_danse_du_papillon_aliette_zumthor_sallee-9782140294846-74491.html
Tout est parti d’un courrier de lecteur, découvert en septembre 2019 : un professeur de physique-chimie reconnaît, dans sa classe, le fils de son ancien harceleur, qui ressemble trait pour trait à son père. Il s’inquiète auprès de la psychologue de sa réaction possible envers cet élève : ne sera-t-il pas tenté de lui faire payer les persécutions du père, même inconsciemment ? La thérapeute lui répond, entre autres choses, qu’il y a là matière à écrire un roman ! Le samedi, à l’atelier Petits Papiers, chez Cécile et Philippe, je choisis d’écrire un texte inspiré de cette histoire, au gré des fameux « petits papiers ». Les retours plutôt positifs m’encouragent à peaufiner à la maison ma nouvelle Le Portrait de son père, que j’envoie à trois ou quatre revues. L’envie d’aller plus loin ne me quitte pas et je m’inscris à un atelier Premier Roman (en formation pro), pour transformer la nouvelle en roman. En avril 2020, la revue Brèves m’appelle pour m’informer qu’elle souhaite publier Le Portrait de son père dans son numéro 116 (collectif « Jeunesse »). Cela renforce encore ma motivation pour le roman, dont j’achève le premier jet en juin. Je poursuis la réécriture les mois suivants. En plus des retours obtenus en atelier, je fais « diagnostiquer » mon texte en janvier 2021 par un site professionnel, puis, après l’avoir remanié, je commence à envoyer mon manuscrit à des éditeurs en septembre 2021, assorti d’une lettre de présentation longuement travaillée, d’un synopsis, etc. Je continue mes envois jusqu’en mars 2022. Sur la quarantaine d’éditeurs contactés, j’obtiendrai six réponses, toutes négatives, mais parfois encourageantes (quand même !). Enfin, en avril 2022, un éditeur (IGB) me téléphone : il a aimé mon roman, mais attend d’avoir l’avis de son comité de lecture et de son associée pour me donner un accord définitif. La même semaine (!), les Editions Il est Midi me contactent à leur tour pour me proposer directement un contrat. C’est avec eux que je signe, en juin 2022. Mon roman, le Fils de l’autre, sort le 10 octobre. L’expérience a été intéressante, même si le livre n’est vendu que sur commande (en librairie, à la Fnac, chez Amazon et sur tous les sites marchands), donc peu visible. Par ailleurs, Il est Midi n’organise pas de dédicaces et ne participe pas à des salons. Enfin, je n’ai jamais rencontré mes éditeurs, nous n’avons échangé que par mail et au téléphone. J’ai donc réalisé moi-même mon dossier de presse et obtenu deux chroniques (sur Femina.fr et Télé-7-Jours) et deux interviews. Un club de lecture, à Pierrefonds, m’a également invitée à une journée de présentation, et je me suis inscrite à deux salons en 2023 (réponse en attente). L’aventure continue, sans bruit, mais c’est formateur… Encore merci à Cécile et Philippe, dont l’atelier Petits Papiers m’a permis de poser les jalons de mon projet. Je leur ai même volé une très jolie phrase, tirée au hasard des « petits papiers » et que j’ai gardée dans le roman, bien évidemment ! Monique Coant-Blond Pour en savoir plus sur le livre, n’hésitez pas à aller sur mes pages Facebook https://www.facebook.com/profile.php?id=100082078084319 et Instagram https://www.instagram.com/emsie_blond/?hl=fr ou, pourquoi pas, sur le site de l’éditeur https://editions-il-est-midi.eproshopping.fr/1740324-LE-FILS-DE-L-AUTRE-Monique-Coant-Blond
LIVRES AIMÉS
J’ai aimé l’atmosphère; j’ai souri ; j’ai admiré le style; j’ai râlé de frustration lorsque je découvrais les personnages petit à petit et non bien campés en début de livre ; j’ai frémi devant le suspens de l’histoire et des personnages; je me suis laissée bercer par l’ambivalence constante entre rêve et réalité; j’ai été touchée quand j’ai enfin compris les visites d’amitié et de souvenirs de ce groupe hétéroclite et j’ai même versé une larme en refermant le livre.
En passant dans le rayons BD (au RDC, pour les grands, pas au 3e chez les enfants) d’une médiathèque, je me suis arrêtée sur Profession du père, de Sébastien Gnaedig. C’est une adaptation du roman de Sorj Chalandon. Je vous le dis tout de suite : je n’ai pas lu la version sans images. Mais la version adaptée a renforcé l’envie de la découvrir, même si je peux m’attendre à une violence accrue. En noir et blanc, en quelques dessins, l’intensité est présente. La dérive d’une homme dans une période sombre de l’histoire de France. « Les événements » dans nos livres d’histoire, pour ne pas dire « la guerre » d’Algérie. Je ne sais pas ce qu’en pensent celles et ceux qui ont lu S. Chalandon. Cette adaptation est une introduction, une ouverture. Profession du père est publié aux éditions Futuropolis en 2018.
Le point de départ de l’auteure est que nous avons été, ou serons, toutes et tous un jour confrontés à la mort de notre mère. La narratrice, journaliste célibataire de 31 ans, décrit ce qui l’oppose à sa sœur, mariée, 2 enfants. Leur mère meurt brutalement. Assassinée. Le lecteur suit avec la narratrice l’enquête, les arrangements pour vider la maison, ce que deviennent les relations familiales et sociales lorsque l’on perd sa mère aussi dramatiquement. Des secrets vont au fil des pages transformer des vérités jusqu’ici bien établies. Il y a beaucoup d’humour dans ces pages. Et des rebondissements. Le récit m’a parlé, souvent. Mère disparue est paru en 2007, édité par les éditions Philippe Rey.
Trois livres en forme de trilogie de Deborah Levy, auteure sud-africaine vivant en Grande-Bretagne : Le goût de la vie, Ce que je ne veux pas savoir et Etat des lieux. Les ouvrages sont traduits par Céline Leroy. Une écriture très ancrée dans la vie, mais en même temps très subtile, où l’auteure à la fois s’interroge sur la présence du passé dans le présent, et très souvent décale notre regard sur des évènements très simples et quotidiens pour en dégager un aspect neuf. Elle y excelle lorsqu’elle questionne, sans verser dans la démonstration, les rapports de genre, son travail d’écrivaine, ses rêves non réalisés. Elle est souvent drôle, légère et toujours intéressante. Merci à la traduction excellente.
Le cercle des menteurs ou Contes Philosophiques du monde entier rapportés par Jean-Claude Carrière. Habituellement, le terme de « contes philosophiques » me donne envie de rebrousser chemin car c’est un genre dont le ton appuyé, l’intention de donner des leçons produit souvent des textes ennuyeux et « voulus » (ce n’est que mon avis !). Ici, c’est tout le contraire : histoires courtes, du conte à la blague, racontées avec le brio qu’a Jean-Claude Carrière pour s’exprimer. Si l’on connait sa voix, on a l’impression en lisant qu’il est présent et qu’il conte à haute voix. Le premier comme le deuxième tome sont des régals. (en photo le deuxième tome)
Un texte très court (78 pages) sur la maladie contractée à son travail par le père du narrateur. Ce que j’ai aimé dans cette écriture, c’est que sous l’apparente pauvreté émotionnelle du texte, l’auteur, en nous livrant la stricte description des faits et gestes des protagonistes, sans à aucun moment ne juger quiconque, nous laisse toute la place pour mobiliser notre propre émotion et penser par nous-mêmes.
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Merci Marija, pour ce post. A la lecture, ce texte trouve toute sa cohérence et les petits pois rouges la place qu’ils méritaient… C’est léger et enlevé.
Merci Christine pour ton retour.
C’était très sympa de t’avoir parmi nous lors de cet atelier.