3 femmes qui courent

C’est une bande de copines sous une pancarte.

– Vous manifestez ? demande un passant.

– Vous trouvez qu’on a des têtes à revendiquer quelque chose ?

– Votre féminité, peut-être ?

– Ben dis-donc, mon cochon, tu signifies que tu nous mates, c’est ça ?!

– Ah non !!! Mais votre t-shirt orange et bleu, vos petits shorts, c’est un régal pour les yeux !

– Et nos pieds où je pense, ce sera un régal pour tes bijoux de famille ! Allez ! Ouste ! Du balai !

Le badaud est vite dépassé.

 

La bande de copines continue audacieusement, le regard alternant entre la ligne bleue qui trace le parcours idéal, et l’horizon plus ou moins bouché d’autres participants.

On appelle cela une manifestation sportive, mais c’est plus modestement une course. Ce jour-là, un semi-marathon.

Selon la forme du moment et la qualité de l’entraînement, ce sont 21097 m à se demander pourquoi on s’est levé ce matin, alors que la couette était si douce et les bras de Jules si réconfortants.

21097 m à regarder où on met les pieds pour ne pas marcher sur les chaussures d’un ou une autre.

21097 m à s’assurer que les copines sont à côté, même si elles sont plus lentes que soi. On s’est juré de partir ensemble, et arriver ensemble. Alors on se soutient.

– Non, Sophie, ne t’arrête pas, tu auras du mal à redémarrer ! Voilà, inspire, expire… penche-toi un peu en avant, cela fera passer ton point de côté.

Et la pancarte ? C’est accessoirement pour vanter les mérites de leur laboratoire de recherche.

 

Mine de rien, il s’en passe des choses, sur une course ! Le public agite des cartons pour encourager des amis, un papa, une maman, un être aimé. Il y a aussi des coureurs qui se trimballent une pancarte verticale, symbole du rythme souhaité.

Tu veux courir en 1h30 ? Suis Jean-Marc !

Tu voudrais courir en 1h45 ? Reste avec Nicolas !

Tu vises les 2h ? Ne lâche pas Delphine !

Tu penses finir en 3h ? Ne quitte pas la voiture-balai !

Si tu espères courir plus lentement, ne t’inscris pas, cela te fera faire des économies et profiter du confort de ton lit un dimanche matin.

 

La bande de copines n’a pas un niveau très homogène. Caroline a beaucoup couru dans sa jeunesse, et elle a envie de retrouver des sensations, l’adrénaline du départ, les endorphines de l’effort.

Isabelle avait rempli une To-do list pour la nouvelle année. Et le semi-marathon en faisait partie. Son truc, c’est la marche nordique. Par chance, Eric, son compagnon, court déjà. Il n’a donc pas contrecarré ses projets. Mieux, il a été son premier supporter. Il est parti avec le premier wagon et compte battre son meilleur temps.

Enfin Sophie a simplement voulu accompagner ses 2 amies. Elle est peu sportive et manque significativement d’endurance. Elle s’est débrouillée pour obtenir un certificat médical ; cependant Isa et Caro l’ont priée de s’entraîner au moins 2 à 3 fois par semaine.

Toute réclamation en cas de décès prématuré serait rejetée.

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