Elle étend sa solitude sur la corde à linge, entre draps, chemises et larmes. Même les eucalyptus se sont mis au diapason, entre silence et contrepoint.
Il est parti avec sa contrebasse grinçante et son archet affûté. Il est parti parce qu’elle grinçait des dents. De si petites dents, une si grande contrebasse, ça n’a pas de sens.
Son panier à linge se remplit de souvenirs, les bons comme les mauvais, surtout les mauvais. Elle n’en peut plus, revit l’emprise singulière et malsaine qu’il exerçait et qui emplit encore le paysage.
Les larmes jaillissent, remplissent son mouchoir, coulent en flots continus, mouillent sa robe ; une flaque se forme ; elle pleure encore et encore. Ca devient tiède, un peu salé, chaud et doux, bienveillant. Maintenant, elle se sent comme lavée de toute cette noirceur.
Elle entr’aperçoit soudain des virgules, des soupirs, des notes, des croches qui dansent joyeusement. Un concert pour célébrer sa renaissance. L’air sent la rose de Saadi, cet odorant souvenir d’un passé en triolet.