Sur un papier blanc, un mot. Pas un mot doux. Quoique. Sur un autre papier, quelques mots. Des écritures bleues, similaires et pourtant les mots ne viennent pas de la même personne. Les mots ont-ils la même signification selon de qui ils viennent ? Les mots d’un amant sont-ils plus forts que ceux d’un parent, d’un enfant ?
Sur un papier, une proposition : un café et une madeleine. Sur la table, des pâtes de fruits, aucun rapport. Sur un autre papier, un contenant : un service à thé à l’anglaise, dans lequel on a sûrement versé le café.
Tamara n’a pas faim. Tamara n’a pas soif. Peut-être a-t-elle soif d’aventure. Peut-être a-t-elle faim d’amour inconditionnel.
Tamara vient d’ici, vient de là-bas aussi, d’un pays lointain et du hameau voisin. Elle se sent à sa place pour un moment dans un endroit. Pour combien de temps ? Elle ne sait pas. Elle sait juste quand il est temps de partir. Ne jamais s’éterniser quelque part. Elle vit comme une personne en cavale. Toujours sur le qui-vive, son sac toujours prêt à jeter les dernières clefs dans une rivière. Ne jamais s’attacher. Réfléchir autrement dès que les sentiments s’en mêlent.
Elle ne sait pas l’âge qu’elle a vraiment. Enfant de la rue, orpheline, elle n’a jamais su sa véritable identité.
Alors, elle en change dès que ça lui chante, dès que sa vie ne lui convient plus. Elle part. Parfois loin, parfois elle traverse juste la rue. Tout dépend de l’élan du moment.
Elle vit comme si elle avait fait quelque chose de mal. Elle ne sait pas si ses parents l’ont abandonnée, si elle les a connus quelques jours, quelques mois, s’ils sont morts.
Cet après-midi, Tamara a trouvé ces deux papiers dans sa boîte aux lettres, perdus au milieu de toutes les publicités. Elle a failli les jeter avec le reste. Elle est intriguée par ces deux écritures bleues qui se ressemblent, qui s’assemblent mais qui sont définitivement écrites par deux personnes différentes. Des voisines ? Des copines ? Deux inconnues ?
Et puis, que font ces deux papiers dans sa boîte aux lettres ? Elle n’y a jamais mis son nom. Elle s’approche pour lire les noms inscrits sur les boîtes au-dessus, en dessous, à côté de la sienne.
Au-dessus, avec l’illustration qui va avec, Betty Boop. Tamara se dit que, comme elle, cette voisine s’invente des prénoms, des vies, peut-être même par procuration. Un des mots lui était-il destiné ? Peut-être même les deux ?
Sur la boîte à côté, Jérémy, juste Jérémy. Écrit à l’encre noire. Comme si tout le monde savait qui pouvait être ce Jérémy dans le voisinage.
En tout cas, Tamara décrète que ce n’est pas lui qui a écrit l’un des mots puisqu’ils sont tous deux écrits en bleu, d’une écriture plutôt féminine.
En dessous de sa boîte, ça déborde de courrier, de publicité. Serait-ce la vieille dame de l’appartement 3B ? Ça fait quelque temps que Tamara ne l’a pas vue prendre l’air. C’est vrai que depuis qu’elle est arrivée, elle a su où trouver du sucre dans le quartier sans avoir à lui demander. Tamara s’inquiète pourtant. C’est mauvais signe une boîte aux lettres dégueulante.
Elle monte au troisième étage et tape à la porte délicatement. Elle appuie son oreille à la porte pour attraper le moindre son. La télévision n’est pas en marche. Rien. Pas un bruit, pas un souffle.
La porte de l’appartement 3A s’ouvre. Le voisin s’apprête à partir.
– Je peux vous aider ?, lui demande-t-il.
– Je m’inquiétais pour la dame du 3B, ça fait un moment que je ne l’ai pas vue.
– Ah, vous n’êtes pas au courant ?
– Euh non, que lui est-il arrivé ?
– Les pompiers l’ont emmenée à l’hôpital. Elle avait fait un malaise. Ça doit faire deux semaines maintenant.
– Ah, soupire Tamara. Et vous avez des nouvelles, elle va bien ?
– Aucune idée. Je travaille de nuit alors j’ai un peu de mal à rencontrer les voisins. Les pompiers sont venus à la fin de mon service, du coup, je les ai vus emmener la voisine.
Au fait, je m’appelle Jérémy, et vous ?
Tamara hésite, donner son prénom du moment, un ancien prénom, un faux nom. Elle a peu de temps pour se décider. Ne pas s’attarder. Ne pas s’attacher. Elle lui tend la main :
– Julie, enchantée.
– Enchanté, Julie, peut-être à une prochaine fois. Je dois y aller là, je couvre pour un collègue qui vient d’avoir un bébé.
– Bonne fin de journée Jérémy.
Le palier du troisième redevient silencieux. L’enquête de Tamara piétine. Une odeur de gâteau fait maison descend du quatrième ou peut-être de plus haut. Elle se mélange à une forte odeur de café. Tamara se hisse jusqu’à l’étage odorant. Le café lui chatouille les narines. Elle se demande si ce sont des madeleines qui sont sorties du four. Ça sent tellement bon.
Elle sursaute : la porte du 5A vient de claquer et des pas dégringolent dans l’escalier.
– J’arrive, j’arrive, Betty.
La voisine du 5A s’excuse : ah pardon, je croyais que Betty m’attendait sur le palier. Pour tout vous dire, je suis en retard pour notre rituel café, madeleine. Bon ben bonne fin de journée madame.
La voisine du 5A toque à la porte. L’odeur du café et des madeleines envahit le cœur, l’estomac de Tamara. Un sourire se dessine enfin sur son visage. Elle s’assoit sur une marche de l’escalier pour s’imprégner de cette douceur.
Au moins, c’est sûr et certain, c’est Betty qui a écrit le mot « un café et une madeleine ». Et c’est peut-être la voisine en retard du 5A qui a écrit l’autre. C’est vrai qu’elle avait un petit accent d’ailleurs, léger, très léger. Une anglaise ?
Tamara en doute mais c’est peut-être elle la propriétaire du service à thé à l’anglaise.
L’enquête de Tamara touche à sa fin. Elle ne sait pas pourquoi ces papiers ont atterri dans sa boîte aux lettres, mais peu lui importe désormais.
Elle a croisé trop de personnes aujourd’hui, elle ne veut pas qu’on la reconnaisse, elle ne veut pas s’attacher.
Elle repense à la voisine du 3B partie à l’hôpital. Pourquoi s’en est-elle inquiétée ? Aujourd’hui particulièrement. Il est temps de prendre le large avant de glisser trop vite vers un endroit qu’elle ne maîtrise pas.
Dans son appartement, elle prend le strict nécessaire, déjà prêt, puis un livre. Le livre dont elle repousse la lecture depuis quelques mois. Elle y cale un marque-page au chapitre un, puis enfourne le livre dans sa besace.
Elle ne prend pas la peine de fermer à clef, laisse même la porte entrouverte. Qui, parmi ses voisins, remarquera en premier sa disparition ?
Tamara a pris le premier train de la première gare qu’elle a croisé sur son chemin. Ça l’emmène vers l’Ouest. La ruée vers l’or bleu, se dit-elle, comme l’encre de ces deux petits papiers qui l’ont fait fuir alors qu’ils proposaient juste un doux moment.
Pourquoi Tamara s’éloigne-t-elle constamment de moments qui pourraient adoucir son cœur, de lieux dans lesquels elle pourrait rester vivre jusqu’à son dernier souffle. En cavale. Toujours en cavale. Jamais recherchée pour autant. Le paysage défile devant ses yeux. Elle préfère le train à l’avion. Les sièges sont un peu plus larges, les tablettes aussi. Il y a de la place pour jouer aux cartes, dessiner, colorier, poser un ordinateur.
Dans l’avion, on est les uns sur les autres, le plateau repas tient au millimètre sur la tablette et l’écran télé est minuscule. Dans le train, Tamara respire mieux que dans l’avion.
Ça ne l’empêche pas de voler dans les airs quand son élan est trop grand et qu’il faut partir beaucoup plus loin. Elle se remémore quand elle était au Brésil et qu’elle s’appelait Baïa. La musique, la danse, le soleil, l’insouciance.
Ce soir, son élan l’envoie vers l’Ouest, vers l’océan. Ça fait longtemps qu’elle n’a pas vu la mer, les vagues. Elle a hâte d’inspirer l’iode, d’entendre le cri des mouettes, d’avoir les cheveux au vent.
Le trajet n’est pas si long pour atteindre l’étendue bleue, l’écume blanche et mousseuse.
À la gare, elle se dirige vers un bus au hasard. Pour faire le trait d’union avec sa vie passée, elle choisit le bus 3B. Elle s’arrête à l’arrêt place de la Madeleine, avec vue sur la mer. Des cerfs-volants dansent dans le ciel. Elle s’assoit à la terrasse d’un café, elle demande un chocolat chaud avec une crêpe au miel.
Son regard balaye l’horizon, le ciel se confond avec l’océan. Elle fouille dans son sac pour en sortir le livre. Elle espère y trouver son prochain prénom. Le livre est écrit à la première personne. À quel moment, sur quelle page connaîtra-t-on le prénom de l’héroïne ?
Tamara range son livre, paie son chocolat chaud et sa crêpe avant le retour du serveur. S’échapper avant de parler avec un étranger. Choisir ses mots, en découvrir de nouveaux. Un café et une madeleine. Un chocolat chaud et une crêpe. Changer la boisson, changer de dessert. Changer de prénom. Laisser Tamara derrière, s’appuyer sur des mots. Des mots d’espoir. Des mots d’amour. Maud, c’est ça, Maud, ce sera son nouveau prénom.
Elle s’avance dans le sable mouillé. Dans son sac, les clefs qu’elle n’a pas encore jetées. Il est temps. Elle avance sur un ponton en pierre et en bois. Maud touche le ciel devenu laiteux.
Elle prend de l’élan et envoie les clefs loin, très loin. Elles reviendront sur la rive après avoir dérivé avec le courant. Aucun indice dessus, ni un porte-clefs symbolique, ni une adresse. Les numéros de série vont sûrement être effacés par l’érosion du sel. Maud l’espère.
Une larme coule sur sa joue. Elle l’essuie avec colère. Ne jamais laisser une émotion paraître. Jamais. Cela la perdra. Elle en est intimement convaincue depuis toujours.
Maud s’avance lentement vers la marina à la recherche de son prochain pied-à-terre, ou doit-on dire pied-à-mer.
Elle veut voguer même à l’arrêt. Elle aime cet endroit. Pour combien de temps ?
Sur la poupe d’un petit bateau, inscrit à l’encre bleue, d’une écriture féminine, Maud lit Terra nova. Elle sourit et cherche à comprendre ce nom qui n’est pas raccord avec l’idée de la mer, de bateau. L’élément terre sur l’élément eau, dans un contenant en bois, amarré sur du métal. Le feu brille dans ses yeux. Ce sera sa nouvelle maison pour quelque temps. Un lieu instable, un lieu qui berce. Elle aborde sans permission. Tout est resté ouvert.
Personne n’a pourtant l’air d’y habiter. Maud s’installe, s’endort sur la banquette. La nuit tombe, le ciel est rempli d’étoiles étincelantes. La lune s’arrondit et veille.
Un chat roux se love dans ses mollets.
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PUBLICATIONS DES PARTICIPANTS
J’ai fréquenté durant plusieurs années les ateliers d’écriture Sous les Toits de Cécile et Philippe, que je viens de retrouver en novembre avec Les Petits Papiers. Depuis la pandémie, je me suis lancée un peu plus « sérieusement » dans l’écriture et mené certains projets à bien. Après « le Fils de l’autre », que j’ai déjà présenté sur ce blog, « Avenue du Père-Lachaise » est mon deuxième roman. Il est né de ce qui devait, au départ, être un recueil de nouvelles. Celles-ci étaient souvent liées les unes aux autres en une sorte de « suite », je les ai remaniées pour en faire cet OLNI (objet littéraire non identifié), qui a trouvé son éditrice, les Editions Marie Romaine, https://www.editionsmarieromaine.fr/. Ce roman choral est sorti en janvier 2024. En voici le pitchDeux femmes, trois hommes, un lieu : le cimetière du Père-Lachaise, à Paris. Au fil de ce roman, des vies se télescopent, des destins se lient, des êtres se trouvent ou se séparent. Les personnages rebondissent d’un chapitre à l’autre, tous réunis dans cette mystérieuse nécropole par l’absence, le manque, le deuil, l’espoir d’une renaissance. Si la mort a un jour croisé leur chemin et redessiné leur parcours, sa présence n’arrive jamais à obscurcir cette valse mi-joyeuse, mi-tragique, au terme de laquelle l’un d’eux va disparaître.Et le lien pour découvrir le livre : https://www.editionsmarieromaine.fr/product-page/avenue-du-p%C3%A8re-lachaise-monique-blond Merci pour votre lecture !
La danse du papillon provient d’un texte court produit pendant un atelier d’écriture que j’avais suivi il y a une trentaine d’années. Par la suite, j’ai repris cet écrit à plusieurs reprises, tout en rédigeant d’autres textes sans rapport avec cette ébauche. C’est plus tard que, disposant de temps et de disponibilité d’esprit, j’ai ressorti de mon ordinateur les brouillons successifs du petit texte initial pour travailler encore et encore une histoire dont je ne savais pas très bien où elle allait. Et petit à petit, quelque chose a commencé à prendre forme, qui s’était éloigné du tout premier texte d’atelier, qui puisait aussi dans d’autres textes moins anciens et se nourrissait de fragments nouveaux, parmi lesquels des ébauches écrites pendant des séances de l’Atelier sous les toits. Le soir, des personnages s’invitaient dans mes rêveries, rechignant parfois contre ce que je venais de leur faire faire ou contre le prénom que je leur avais donné, formant petit à petit l’histoire à ma place. Je griffonnais quelques notes et le lendemain, j’essayais de traduire ces notes en écriture… essais parfois fructueux, pas toujours ! Parvenir à la forme aboutie de La danse du papillon m’a pris plus de six ans. Si je reviens sur ce travail d’écriture, je peux distinguer plusieurs aspects. D’abord, le travail de la phrase : portée à écrire de longues phrases pleines de digressions et d’incises dans tous les sens, j’ai dû énormément les retravailler. Pendant plusieurs années, j’écrivais chaque jour un ou deux paragraphes, ou seulement deux ou trois lignes, et je les raturais et les réécrivais indéfiniment les jours suivants en me disant que c’était nul, et moi avec. L’écriture de La danse du papillon m’a servi d’exercice d’écriture mais aussi, en étant aussi quotidiennement présente, m’a coupée d’autres formes, comme par exemple la forme poétique dont je me suis éloignée à regret. Ensuite le travail de la structure : comment organiser l’histoire, présenter les évènements, ménager un certain suspens. Longtemps, le récit n’avait aucune structure, probablement aussi parce que les grandes lignes de l’histoire n’étaient pas encore clairement définies. Puis, quelque chose a « pris » et la structure est apparue. Evidemment, je n’avais pas fait de frise chronologique et mes personnages apparaissaient n’importe quand, à rebrousse-temps : pourquoi pas, en théorie, un récit temporellement déstructuré, mais cela ne se prêtait pas à l’histoire que je voulais raconter. Je me suis donc emmêlé les pinceaux jusqu’à ce que ça tienne à peu près et que je déclare la structure achevée. Désireuse d’en finir, je n’ai pas écouté la petite voix intérieure qui tentait de me dire qu’en fait la structure était bancale. Cécile, à qui j’ai confié la relecture de la première version de ce récit dans le cadre de l’Atelier Face à Face, m’en a aussitôt fait la remarque. Il a fallu me remettre à la tâche, couper, tailler et retailler et m’apercevoir qu’avec la nouvelle combinaison, ça ne collait plus, des évènements se produisent dans le mauvais sens, des gens mouraient avant d’être nés etc…. Finalement, ça c’est fait, en quelques mois. La manuscrit terminé, j’en ai éprouvé à la fois de la joie et de la légèreté. Je n’avais pas l’idée que cet écrit puisse être publié. Je l’ai offert à mes proches en format A4 et c’est de mon entourage qu’est venu l’encouragement à chercher un éditeur… J’ai mis du temps à faire la démarche, je ne me sentais pas légitime et je me demandais ce qu’un bouquin de plus viendrait ajouter à des masses et des masses de livres publiés chaque semaine…. Nombreux ont été les refus implicites (pas de réponse sous 4 mois signifie un refus) et les refus par courrier, certains assortis de commentaires encourageants, jusqu’à ce que les éditions de l’Harmattan acceptent de le publier. Je continue à me demander si publier est une fin en soi : ce qui a compté le plus, c’est d’avoir écrit. Mais maintenant, je ne peux plus faire abstraction du fait que ce livre est publié et c’est vrai que savoir son texte lu par d’autres yeux, d’autres oreilles, par des âmes éloignées que l’on ne connaît pas, et parfois en recevoir un témoignage, c’est tellement fort ! D’une certaine façon, on en fait l’expérience à une autre échelle en atelier d’écriture ou dans le blog de l’Atelier : le partage de ce que l’on a écrit, le retour des lecteurs ou des auditeurs (selon la forme de l’atelier) est une expérience du risque, de la remise en question mais aussi du partage et de la joie. La danse du papillon se commande dans toutes les librairies, sur les sites de vente en ligne et sur le site des éditions de l’Harmattan : https://www.editions-harmattan.fr/livre-la_danse_du_papillon_aliette_zumthor_sallee-9782140294846-74491.html
Tout est parti d’un courrier de lecteur, découvert en septembre 2019 : un professeur de physique-chimie reconnaît, dans sa classe, le fils de son ancien harceleur, qui ressemble trait pour trait à son père. Il s’inquiète auprès de la psychologue de sa réaction possible envers cet élève : ne sera-t-il pas tenté de lui faire payer les persécutions du père, même inconsciemment ? La thérapeute lui répond, entre autres choses, qu’il y a là matière à écrire un roman ! Le samedi, à l’atelier Petits Papiers, chez Cécile et Philippe, je choisis d’écrire un texte inspiré de cette histoire, au gré des fameux « petits papiers ». Les retours plutôt positifs m’encouragent à peaufiner à la maison ma nouvelle Le Portrait de son père, que j’envoie à trois ou quatre revues. L’envie d’aller plus loin ne me quitte pas et je m’inscris à un atelier Premier Roman (en formation pro), pour transformer la nouvelle en roman. En avril 2020, la revue Brèves m’appelle pour m’informer qu’elle souhaite publier Le Portrait de son père dans son numéro 116 (collectif « Jeunesse »). Cela renforce encore ma motivation pour le roman, dont j’achève le premier jet en juin. Je poursuis la réécriture les mois suivants. En plus des retours obtenus en atelier, je fais « diagnostiquer » mon texte en janvier 2021 par un site professionnel, puis, après l’avoir remanié, je commence à envoyer mon manuscrit à des éditeurs en septembre 2021, assorti d’une lettre de présentation longuement travaillée, d’un synopsis, etc. Je continue mes envois jusqu’en mars 2022. Sur la quarantaine d’éditeurs contactés, j’obtiendrai six réponses, toutes négatives, mais parfois encourageantes (quand même !). Enfin, en avril 2022, un éditeur (IGB) me téléphone : il a aimé mon roman, mais attend d’avoir l’avis de son comité de lecture et de son associée pour me donner un accord définitif. La même semaine (!), les Editions Il est Midi me contactent à leur tour pour me proposer directement un contrat. C’est avec eux que je signe, en juin 2022. Mon roman, le Fils de l’autre, sort le 10 octobre. L’expérience a été intéressante, même si le livre n’est vendu que sur commande (en librairie, à la Fnac, chez Amazon et sur tous les sites marchands), donc peu visible. Par ailleurs, Il est Midi n’organise pas de dédicaces et ne participe pas à des salons. Enfin, je n’ai jamais rencontré mes éditeurs, nous n’avons échangé que par mail et au téléphone. J’ai donc réalisé moi-même mon dossier de presse et obtenu deux chroniques (sur Femina.fr et Télé-7-Jours) et deux interviews. Un club de lecture, à Pierrefonds, m’a également invitée à une journée de présentation, et je me suis inscrite à deux salons en 2023 (réponse en attente). L’aventure continue, sans bruit, mais c’est formateur… Encore merci à Cécile et Philippe, dont l’atelier Petits Papiers m’a permis de poser les jalons de mon projet. Je leur ai même volé une très jolie phrase, tirée au hasard des « petits papiers » et que j’ai gardée dans le roman, bien évidemment ! Monique Coant-Blond Pour en savoir plus sur le livre, n’hésitez pas à aller sur mes pages Facebook https://www.facebook.com/profile.php?id=100082078084319 et Instagram https://www.instagram.com/emsie_blond/?hl=fr ou, pourquoi pas, sur le site de l’éditeur https://editions-il-est-midi.eproshopping.fr/1740324-LE-FILS-DE-L-AUTRE-Monique-Coant-Blond
LIVRES AIMÉS
J’ai aimé l’atmosphère; j’ai souri ; j’ai admiré le style; j’ai râlé de frustration lorsque je découvrais les personnages petit à petit et non bien campés en début de livre ; j’ai frémi devant le suspens de l’histoire et des personnages; je me suis laissée bercer par l’ambivalence constante entre rêve et réalité; j’ai été touchée quand j’ai enfin compris les visites d’amitié et de souvenirs de ce groupe hétéroclite et j’ai même versé une larme en refermant le livre.
En passant dans le rayons BD (au RDC, pour les grands, pas au 3e chez les enfants) d’une médiathèque, je me suis arrêtée sur Profession du père, de Sébastien Gnaedig. C’est une adaptation du roman de Sorj Chalandon. Je vous le dis tout de suite : je n’ai pas lu la version sans images. Mais la version adaptée a renforcé l’envie de la découvrir, même si je peux m’attendre à une violence accrue. En noir et blanc, en quelques dessins, l’intensité est présente. La dérive d’une homme dans une période sombre de l’histoire de France. « Les événements » dans nos livres d’histoire, pour ne pas dire « la guerre » d’Algérie. Je ne sais pas ce qu’en pensent celles et ceux qui ont lu S. Chalandon. Cette adaptation est une introduction, une ouverture. Profession du père est publié aux éditions Futuropolis en 2018.
Le point de départ de l’auteure est que nous avons été, ou serons, toutes et tous un jour confrontés à la mort de notre mère. La narratrice, journaliste célibataire de 31 ans, décrit ce qui l’oppose à sa sœur, mariée, 2 enfants. Leur mère meurt brutalement. Assassinée. Le lecteur suit avec la narratrice l’enquête, les arrangements pour vider la maison, ce que deviennent les relations familiales et sociales lorsque l’on perd sa mère aussi dramatiquement. Des secrets vont au fil des pages transformer des vérités jusqu’ici bien établies. Il y a beaucoup d’humour dans ces pages. Et des rebondissements. Le récit m’a parlé, souvent. Mère disparue est paru en 2007, édité par les éditions Philippe Rey.
Trois livres en forme de trilogie de Deborah Levy, auteure sud-africaine vivant en Grande-Bretagne : Le goût de la vie, Ce que je ne veux pas savoir et Etat des lieux. Les ouvrages sont traduits par Céline Leroy. Une écriture très ancrée dans la vie, mais en même temps très subtile, où l’auteure à la fois s’interroge sur la présence du passé dans le présent, et très souvent décale notre regard sur des évènements très simples et quotidiens pour en dégager un aspect neuf. Elle y excelle lorsqu’elle questionne, sans verser dans la démonstration, les rapports de genre, son travail d’écrivaine, ses rêves non réalisés. Elle est souvent drôle, légère et toujours intéressante. Merci à la traduction excellente.
Le cercle des menteurs ou Contes Philosophiques du monde entier rapportés par Jean-Claude Carrière. Habituellement, le terme de « contes philosophiques » me donne envie de rebrousser chemin car c’est un genre dont le ton appuyé, l’intention de donner des leçons produit souvent des textes ennuyeux et « voulus » (ce n’est que mon avis !). Ici, c’est tout le contraire : histoires courtes, du conte à la blague, racontées avec le brio qu’a Jean-Claude Carrière pour s’exprimer. Si l’on connait sa voix, on a l’impression en lisant qu’il est présent et qu’il conte à haute voix. Le premier comme le deuxième tome sont des régals. (en photo le deuxième tome)
Un texte très court (78 pages) sur la maladie contractée à son travail par le père du narrateur. Ce que j’ai aimé dans cette écriture, c’est que sous l’apparente pauvreté émotionnelle du texte, l’auteur, en nous livrant la stricte description des faits et gestes des protagonistes, sans à aucun moment ne juger quiconque, nous laisse toute la place pour mobiliser notre propre émotion et penser par nous-mêmes.
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