Premiers pas

La rue est ensoleillée ce matin. Seules les fleurs de cerisiers s’agitent admirablement. Une envie d’aller marcher monte dans ses jambes encore dodues.
L’enfant se tient au muret. Il voudrait marcher comme un adulte. D’un air serein, hautain, tout simplement. Il se rassure, il s’éloigne un peu de la maison aux briques rouges, son point de départ. Il se lance allègrement. Un sourire vainqueur s’affiche maintenant sur son visage joufflu.
Il aime ce goût de liberté et l’odeur du mimosa qu’il aperçoit un peu au loin.
Il rallonge sa foulée, lance une jambe, puis l’autre. La sensation du béton dur l’interpelle. Rien à voir avec le revêtement du parc, tout mou, dans lequel il s’enfonce. Il se sent les pieds sur terre, prêt à manifester sa victoire du jour.
Il aurait bien aimé croiser son amoureuse de la crèche, lui montrer affectueusement qu’ils pouvaient être solidaires dans cette aventure qu’est l’apprentissage de la marche svelte, légère, classe, du haut de leurs trois pommes.
Il se concentre. La couche le gêne pour être stable. Il fera une réclamation à ses parents : il est grand maintenant. Il sait marcher. Il sait manger seul. Plus besoin de couches qui l’empêchent d’atteindre ses rêves sauvages.
Il se rattrape au muret, le malaxe subtilement, il ne faudrait pas qu’on remarque qu’il a perdu l’équilibre. Il respire un bon coup. L’objectif du jour, atteindre les mimosas de la voisine. Il relève la tête ardemment, fléchit ses genoux, rebondit sur place. Il avance ainsi, ses cheveux soyeux balayés par une petite brise. Ça le chatouille, il sourit. Il a l’impression de participer à un marathon pour la première fois. Son visage est rayonnant, sa démarche de plus en plus confiante.
Il lâche le muret audacieusement. Il atteint les mimosas de la voisine. Il sent les fleurs, il se met du jaune plein le visage. Il entend l’eau de la rivière chanter un peu plus bas. Ce sera son prochain objectif : marcher jusqu’à la rivière. Avant son anniversaire.
Il fait une pirouette pour faire demi-tour. Ses bras lui permettent de garder l’équilibre. Il fait un retour triomphal, aucune hésitation dans ses pas, serein. Il marche comme un grand, il le sait, il le sent. Devant sa maison, ses parents l’attendent, chacun tenant l’extrémité d’un ruban rouge.
L’enfant s’émerveille : les fleurs du cerisier, le mimosa, le ruban rouge. Tout est splendide.
Il atteint le ruban. Ses parents l’applaudissent et le félicitent pour sa course.
Il a bien mérité un bon goûter !

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