Blanche aux petits pois

Blanche venait de sortir de taule. Elle avait réussi à montrer patte blanche pour bon comportement, ce qui lui avait valut une sortie anticipée de sa cellule en tôle faite de bric et de broc aspergée d’urine. Aujourd’hui, tout était fini et tout commençait à la fois. En dépassant le portique de la prison, le poids qu’elle portait depuis cinq ans sur ses frêles épaules s’envola ; elle ne mangerait enfin plus la typique soupe aux petits pois du réfectoire qu’elle avait en horreur. Ce breuvage, vomi vert-Shrek dégueulasse était pour elle un supplice. Il était imbuvable. Tout aussi imbuvable d’ailleurs que Cathy, cette bonne femme sèche de la cantoche qui semblait prendre plaisir à la resservir de grandes louchées. Blanche se demandait si Cathy le faisait exprès où si c’était parce qu’elle louchait. Who knows ? En tout cas, Blanche allait désormais pouvoir choisir les mets de son choix. Et, comme c’était le mois de mai, elle commencerait sans nul doute par les premières cerises de la saison. Elle passerait ainsi son temps libre à les équeuter tout en poursuivant le rêve de devenir un jour Cerise de la publicité Groupama, dont elle avait toujours été fan en secret. Bizarre, mais pourquoi pas ? Après tout, Blanche était loufoque. Son mari, le bon vieux René, mort en avalant un pépin de raisin (paix à son âme), l’avait aimée comme il fallait et ne lui avait jamais causé ni pépins, ni chagrin. Ce-dernier lui répétait toujours : Blanche, je t’adore car tu es loufoque, tu as à la fois la rage du loup et la rondeur du phoque. Et c’était pour elle le plus beau compliment du monde.

 

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