Les chars….

les chars sont arrivés à la fin de l’été, sans bruit, dans un glissement sournois. Lorsque à l’aube les paysans ont voulu inspecter leurs récoltes, ils se sont retrouvés en face de cet alignement métallique. Une masse noire qui pointait sa gueule allongée vers leurs maisons. C’est ainsi que la plaine se retrouva barricadée, encerclée. C’était La guerre, une fois de plus la guerre, une guerre de coqs hystériques, avides de nouveaux territoires, une guerre aux motifs vagues. Les villageois jusqu’au dernier moment n’avaient pas voulu y croire. Ils avaient entendu les tirs d’obus, de l’autre côté de la montagne mais ils affirmaient que jamais les Autrichiens n’oseraient venir jusqu’à l’Emilie Romagne. La veille un groupe d’Américains leur avait conseillé de quitter leurs maisons. La conscription ne leur avait pas encore enlevé leurs fils alors ils avaient continué à faucher le blé et le sarrasin. Parmi ces Américains, engagés volontaires aux côtés des Italiens  se trouvait un grand costaud barbu qui s’était précipité  dans l’unique café du village et y avait descendu un litre d’eau de vie. Un certain Hemingway!

Puis les jours ont passé, la masse menaçante des blindés a bouché l’horizon. Plus de doute maintenant, l’armée Autrichienne se dirigeait tout droit sur Rome. Malgré la désorganisation générale les Italiens ont commencé à réagir. Sur le quai de la petite gare de Mesarina les mères en hurlant, en se frappant la poitrine, en maudissant la vie, la guerre, dieu et les envahisseurs,  les mères déchirées ont dit adieu à leurs fils qu’on a conduit vers les plaines qui allaient les engloutir. Morts au champ d’honneur les Ernesto, les Tonio, les Angelo.

O mes chères Dolomites en représailles  vous êtes devenues italiennes pour punir les Allemands vaincus. Mais vous, ça vous est egal, la lumière sur vos pentes neigeuses est une joyeuse apatride, elle parle toutes les langues de l’éblouissement. L’escalade n’a pas de nom de pays et les grimpeurs aiment respirer au large.

Dans la petite église d’Elvas il arrive qu’un jeune homme parlant allemand épouse une belle brune de langue italienne. C’est toujours ça de gagné sur la barbarie!

 

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Une réponse à Les chars….

  1. Emmanuelle P dit :

    Profond et pertinent !

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